Critique : The bunny game (2010) (Adam Rehmeier)
Synopsis : Junkie et sans domicile fixe, Bunny se prostitue afin de gagner de l’argent pour acheter sa drogue quotidienne. Cependant, sa route croise un jour celle de Hog, un camionneur qui va lui faire regretter amèrement tous ses vices.
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The bunny game…Un film sacrément controversé qui s’est vu censuré par le BBFC lors de sa premiére sortie alors qu’il ne comportait aucune goutte de sang. D’emblée, on peut dire que j’ai une histoire plutôt intime avec ce film. Pour résumer, après l’avoir découvert j’ai quasi immédiatement tout fait pour le faire connaitre en France. D’ailleurs à cette époques (en 2010) les membres d’ ultragore (en 2010), refusaient de me croire , tous pensaient que ce film n’existait pas, que c’était une bande-annonce fake pour faire rêver le spectateur. D’ailleurs, à cette époque j’avais suggéré à Adam Remhier (le réalisateur) d’éditer son film chez Elephant film. Ravi de voir que c’est ce qu’il a fait 3 ans après. J’aurai une autre anecdote sympathique que j’ai déjà mentionné dans Jonas par rapport à l’acteur du film jouant le camionneur.
Maintenant, centrons-nous sur le film en lui-même. Contrairement à ce qu’on peut souvent lire sur la toile, The bunny game n’a jamais eu comme vocation d’être un torture porn, il s’en sert simplement comme support. Le mot qualifiant le mieux cette œuvre est « expérience ». Expérience de Rodleen, une actrice hors du commun ayant subi le calvaire qu’elle endure au cours du film dans la vie réelle, et utilisant ainsi ce film comme une thérapie post-traumatique. Une manière courageuse d’évacuer ses démons et d’utiliser ceci comme un exutoire.
Bien que ce point soit recevable, ce n’est pas une raison pour donner plus de crédit au film, car l’expérience montre d’elle-même ce qu’elle est capable d’émaner, une immersion totale. C’est là où il est important de prendre Bunny game sous un angle bien différent d’un torture porn, car en réalité Bunny game ne se regarde pas, il se vit. Nombreux sont ceux qui demeurent hermétiques à cette immersion totale nous baladant nous-même dans les tréfonds dans l’enfer, dans ce camion, avec Rodleen, mais l’intensité du film est indéniable.
Bunny game est une œuvre cathartique et son but est de montrer comment l’énergie négative peut nous détruire la vie, comment sa prostitution l’amène à un enfer bien pire que celui dans lequel elle est déjà. Son tortionnaire pratique sur elle une sorte d’expérience oscillant un exorcisme mental et une thérapie post traumatique. Bunny game représente le coté « malsain » de l’homme comme le second film de Adam Remhier (Jonas) représente le coté « Bon » de l’homme. Nos deux seuls personnages illustrent la métaphore du chasseur et du lapin, d’où le titre. Rodleen, erre dans la nature, illustre le lapin (Bunny), allant d’un endroit à un autre, s’approchant imprudemment du danger, tandis que le camioneur, prédateur (ici axé comme prédateur sexuel) la chasse avec une cruauté moderne liée à l’hyper sexualisation.
l’Esthétisme du film ? Singulier mais vraiment pas rebutant. Un noir et blanc soigneux et des plans de caméra faisant penser à un long clip expérimental. Il est d’ailleurs fort probable que Adam ait fait ses classes dans le domaine du clip vidéo. Si la plupart des spectateurs lâchent en court et même « méprisent » (on peut le dire au vu de certaines critiques sur des sites de cinéma conventionnel) le film, voir le réalisateur, c’est par ce qu’ils se sentent « agressés ». Les plans de caméras et la musique retranscrivent une certaine violence, la forme du film est très agressive et peut même paraitre gratuite. Ce n’est pourtant qu’une sexualité sans complexe amené à son paroxysme, volontairement rendu malsaine pour pousser le spectateur dans ses derniers retranchements. Ce film n’a aucunement pour but de divertir, mais plutôt de faire vivre un cauchemar, et c’est réussi. On notera un travail impressionnant sur le son, les bruitages parfaitement synchronisés et mesurés favorisant à l’immersion sonore. Il est possible de ne pas aimer Bunny game, mais il y a certaines choses qu’on ne peut pas lui enlever.
En s’écartant de l’univers urbain, on pourra apercevoir des allégories christiques telles que Hog crucifiant Bunny, la faisant ainsi passer pour un martyr. Ce symbolisme ramènera alors à la position du Christ face aux Chrétiens, faisant d’emblée le parallèle avec la position de Bunny face à la déchéance humaine.
Malgré quelques passages redondants vers le milieu, Bunny game est une expérience sensorielle et symbolique aux antipodes du torture porn et, selon moi, que l’on peut facilement ériger au rang de film culte. Depuis le temps, je devais absolument faire cette critique/analyse. J’invite alors tous les détracteurs du film à venir débattre si vous n’êtes pas d’accord avec cette critique.
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